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7 septembre 2008 7 07 /09 /septembre /2008 03:40





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                          DIALOGUE, OU TOLÉRANCE ?

          Dialogue, du grec dià-logein, "se parler l'un l'autre". Pour dialoguer, il faut parler la même langue, c'est-à-dire avoir les mêmes références. Qu'en est-il entre chrétiens et musulmans ?

I. Le passé, et le présent

          Dès ses débuts, l'auteur du Coran se définit par son opposition violente au judaïsme et au christianisme. La deuxième partie du Coran (dite "médinoise") est en fait le carnet de route d'un chef de guerre, qui prêche et qui pratique la conquête du pouvoir par l'élimination (entre autres) des juifs et des chrétiens.
          L'islam s'est étendu au détriment des puissances chrétiennes. Jusqu'au coup d'arrêt de la bataille de poitiers (732) : coup d'arrêt très momentané, puisque l'histoire de l'Occident restera dominée par la lutte contre les "Maures". Le siège de Vienne (1529), la bataille de Lépante (1571), sont quelques épisodes parmi tant d'autres de l'affrontement durable et permanent entre musulmans et chrétiens. Affrontement inévitable, puisqu'il est inscrit dans la lettre même du Coran, le texte fondateur de l'islam.
          En un seul lieu, l'Andalousie, et pendant une période limitée, l'islam a pu instaurer une coexistence pacifique avec les chrétiens. Coexistence toute relative : c'était la paix offerte par le vainqueur musulman aux chrétiens hispaniques soumis. Ne nous y trompons pas : le royaume arabe d'Al-Andalous est une exception dans l'histoire d'une confrontation incessante, par la violence, entre musulmans agresseurs et chrétiens sur la défensive.

          Puis le pendule de l'Histoire a tourné : ce sont les chrétiens qui sont devenus agressifs et conquérants, par la colonisation et l'anéantissement de l'Empire Ottoman.
          Au début du XX° siècle, les peuples musulmans étaient partout asservis par des puissances chrétiennes.
          Grâce en partie à la manne pétrolière, nous assistons depuis 1/2 siècle au réveil de la conscience musulmane. Aujourd'hui, l'affrontement islam/chrétienté se rééquilibre au profit des musulmans. Conséquence : le "fait religieux" prend sous nos yeux une place considérable dans les médias des pays occidentaux, qui se voudraient pourtant laïques.
          On entend beaucoup parler de "dialogue inter-religieux", et ce terme vise toujours le dialogue entre monde chrétien et monde musulman.
          Ce dialogue est-il un mythe, un leurre, ou un idéal réalisable ?

II. L'évolution de l'Occident chrétien

          Constitué en théocraties pendant 15 siècles, de 381 à la fin du XIX° siècle (la Révolution française n'est qu'une brève parenthèse), l'Occident a accompli en un siècle une évolution considérable : la séparation des deux sphères, civile et religieuse, s'est imposée partout - on l'appelle laïcité. Elle s'accompagne d'un déclin des Églises historiques, qui adoptent une position de refus sur la "modernité". A des degrés divers, selon qu'il s'agit des Églises orthodoxes (toujours liées au pouvoir), catholique (crispée sur ses dogmes) ou protestantes (plus ouvertes, mais en position de faiblesse face aux divers "renouveaux" évangéliques).
          Ce déclin, qui marque la fin d'un monde dominé par elles, les Églises historiques se montrent incapables de l'enrayer. Sociologiquement, il apparît spectaculaire et irrémédiable. Mais un phénomène plus discret a miné profondément l'establishement ecclésial : ce sont les progrès de l'exégèse.
          Initiée au XIX° siècle par les protestants (alors seuls libres de penser et de travailler), l'exégèse historico-critique a été condamnée par l'Église catholique jusqu'en 1943. Contraint par les faits, Pie XII (encyclique Divino afflante spiritu) a fini par en accepter le principe, et par l'autoriser aux catholiques.
          Depuis, la Bible est étudiée comme n'importe quel autre texte ancien. Quelques chercheurs catholiques, peu connus du public, sont à la pointe de cette recherche. On redécouvre que Jésus était juif, que son enseignement était celui d'un juif et non d'un chrétien. On apprend à distinguer ce qui vient de lui, et ce qui a été rajouté dans les Évangiles par ses héritiers autoproclamés, pour des raisons qui tiennent plus de la politique que de l'Esprit-Saint. Le visage de Jésus, et son enseignement, sortent peu à peu de l'ombre des dogmes.
           Je vois dans ce travail en cours l'espoir d'un Occident démoralisé par la perte de ses repères ancestraux.
          Le même travail a été fait pour l'Ancien Testament. On sait distinguer ce qui tient à l'époque - les appels à la violence, notamment - et ce qui est le message profond des Prophètes du judaïsme, Prophètes dont Jésus se veut explicitement le continuateur : "Je ne suis pas venu pour abolir, mais pour accomplir"

          La Bible avait pu servir à St Bernard pour écrire la Règle des Templiers : "Sache, écrit-il aux moines-soldats, que si tu tues, c'est pour le Christ. Et si tu es tué, c'est pour Dieu". Aujourd'hui, plus aucun chrétien, même peu cultivé, ne tiendrait ce langage.
          Sauf peut-être quelques-uns de nos intégristes : hélas, ils ont fait souche aux USA, où certains évangélistes reprennent à peu près cette idéologie meurtrière d'un djihad chrétien.
          Ayant appris à lire la Bible, nous sommes en paix avec nous-mêmes et prêts à entamer un dialogue avec d'autres, qui se réclament eux aussi du Dieu d'Abraham.
          Du moins, c'est ce qu'affirme la pensée politiquement correcte diffusée par nos médias : c'est le dialogue inter-religieux dont nous rêvons avec l'islam.

III. Les musulmans : bulletin de santé

          Ce travail fondamental sur nos textes sacrés, tout ce qui fait autorité dans l'islam l'interdit aux musulmans. Il y a un dogme absolu, intangible, fondateur : le Coran existe par lui-même, au ciel. Ce Coran céleste, il a été dicté par l'ange Gabriel à un Muhammad inculte, qui écrivait sans comprendre. Le Coran est ainsi, grammaticalement, la pensée même de Dieu. Ce n'est pas une pensée humaine : c'est LA parole de Dieu, exprimée dans la seule langue capable de la transmettre, l'arabe.
          Il est donc inconcevable - et interdit - d'appliquer au texte du Coran les méthodes de l'exégèse historico-critique. Que ce texte, comme n'importe quel autre, reflète l'évolution d'un homme (son auteur) dans un milieu donné, à une époque donnée. Qu'il ait été retouché par la suite. Que sa compréhension soit rendue difficile, voire impossible, par une tradition (Hadits et Sunna) qui s'en est servie pour établir, puis conforter le pouvoir de Califes et de royaumes arabes - un musulman qui affirme cela est passible de mort.
          En France, les Nouveaux Penseurs de l'islam s'arrêtent tous au seuil de cette frontière infranchissable : la nature du Coran - et par conséquent, la personne du Prophète.

          Pendant des siècles, les chrétiens eux aussi ont cru que la Bible avait été dictée par Dieu à Moïse, seul auteur du Pentateuque. On sait maintenant qu'il n'en est rien. Eh bien ! Ce travail (qui fut pour nous long et douloureux), les musulmans ne l'ont pas encore commencé.
          Quelques chercheurs français s'y sont attelés : le P. Gabriel Théry ou le fr. Bruno Bonnet-Aymard (tous deux intégristes catholiques, ce qui ne retire rien à l'intérêt de leurs travaux). Et plus récemment M. Marie-Édouard Gallez. J'ai longuement travaillé et retravaillé leurs ouvrages, confidentiels et difficiles à trouver. Le résultat est à la fois stupéfiant, et riche d'un immense espoir.

IV. Vous avez dit "dialogue" ?

         Stupéfiant, parce qu'il montre la distance qu'il y a entre la légende musulmane et la réalité du texte. La même distance, tout compte fait, qu'il y avait entre la vieille idéologie chrétienne et la réalité de l'Ancien Testament ou des Évangiles.
          Riche d'espoir, parce qu'il permet - enfin - de faire le tri dans les paroles du Coran. Et parce qu'on découvre que l'auteur a été un arabe converti au judaïsme rabbinique du VII° siècle, avant de rencontrer des hérétiques du christianisme (les nazoréens, souvent cités dans le Coran). Que dans le Coran se mélangent les eaux de ce judaïsme et de ce christianisme particuliers et marginaux. Que la violence, et l'appel à la violence, qui parcourent tout le texte viennent à la fois de ses sources juives rabbiniques, et du tempérament d'un homme, son auteur.
          Entreprendre l'éxégèse historico-critique du Coran, ce serait trouver le chemin d'un véritable dialogue entre juifs, musulmans et chrétiens. Ce serait faire la part des choses, comme nous avons su le faire pour l'Ancien Testament, comme on est en train de le faire (bien discrètement !) pour les Évangiles.

          Tant que ce travail ne sera pas entrepris ouvertement et publiquement, il n'y aura pas de dialogue possible entre islam et christianisme, entre monde musulman et Occident. On se contentera de discourir gravement sur le port du voile, l'application de la Cha'aria, la communauté de foi au même Dieu - mais... est-ce bien le même ?
          Faute de vrai dialogue, on se repliera sur la tolérance.
          On tolère ce qu'on ne peut pas éviter. On tolère des enfants turbulents, une rage de dents, des voisins incivils, l'énergie nucléaire, que sais-je... On tolère, mais on n'accepte pas profondément ce qu'on tolère. On supporte l'insupportable.
          Quand on tolère, on "fait avec", on s'en accomode tant bien que mal, pour éviter l'affrontement.
          La tolérance n'est pas le dialogue. La tolérance, c'est l'aveu de l'échec du dialogue.

          Pour que naisse un dialogue inter-religieux avec les musulmans, il faudra qu'ils s'engagent dans le long chemin qui fut celui des chrétiens vis-à-vis de leur propre "révélation"


          I have a dream ! Que des chrétiens (qui auraient vraiment digéré leur mutation) s'assoient à côté de musulmans. Qu'ils leur disent combien ce fut difficile pour eux, mais aussi immensément profitable. Quelle paix profonde provoque la redécouverte du visage de ceux qui ont transmis des textes, devenus sacrés.

Et qu'aucun texte n'est "sacré" : tout texte "sacré" n'a qu'une mission : nous conduire à Celui qui est au-delà des mots.
          I have a dream ! En verrai-je le commencement, avant de mourir ?

                                     M.B., 1° mai 2008


http://michelbenoit17.over-blog.com/article-19208523.html

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